Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le puy Griou ... et les autres

Faire partager mes passions : présenter le volcan cantalien et son seigneur, le Puy Griou. Parler de mes autres centres d'intérêts.... les vaches Salers, l'histoire, la cuisine ....

Un an au Gaec Salat (4)

Beaucoup de respect devant ces deux hommes. Il aurait fallu une photo des mains du Tonton ! 

© La Montagne

© La Montagne

Un an aux champs (4) : Jean et Michel, l’oncle et le père de Charlotte Salat, l’épaulent toujours au Gaec
 

 

© La Montagne 17.12.2015

Avant, puis derrière Charlotte Salat, il y a deux hommes de caractère. Jean, l’oncle, Michel, le père. Deux témoins d’un monde qui a changé.

 

9 heures du matin. Un samedi d'hiver, quand les bêtes n'ont pas à être traites. Et pourtant. Jean, 67 ans, et Michel, 65, sont déjà en tenue. Gros godillots, bleu de travail ou bleu de Gênes, bonnet pour l'un, casquette pour l'autre, enfoncées sur la tête. Et une bonne roulée au coin du bec. Car le boulot a déjà commencé depuis belle lurette, autour de cette étable qu'ils connaissent comme s'ils l'avaient faite. Et pour cause : ils l'ont faite. L'oncle et le père de Charlotte Salat se sont installés sur ces terres en 1971. Suivant la voie tracée par le père Auguste, qui élevait des salers dès 1958, à Farges. Ensemble, ils monteront le Gaec en 1977, la mère remplacera le père à sa retraite en 1984. « Parce qu'à l'époque, il n'y avait pas de statut pour les femmes d'agriculteurs », se rappelle Jean.

À l'époque, tout était différent. « On peut dire qu'on a connu l'évolution de l'agriculture de A à Z sourit Jean. On a vu les bras être remplacé par l'hydrolique. On a commencé par ramasser le foin à la fourche, on a vu les tracteurs arriver, les bottes passer de 15 à 450 kg. Jeunes, on allait même abreuver les bêtes à la fontaine. » La tâche était plus rude. Et les semaines, sans fin. « On n'a jamais pris de vacances, jamais pris de week-end. On a dû bosser 366 jours certaines années. Maintenant, si les jeunes peuvent se reposer, tant mieux pour eux », témoigne Michel, taquin. « Il dit ça pour moi, rigole sa fille. Mais si je peux me reposer, c'est parce qu'ils sont toujours là. » « Un bout de ferraille dans la terre, ça peut attendre le lendemain, embraye Jean. Mais des vaches, c'est vivant. Alors, si on ferme les yeux, il faut s'attendre à ce qu'il se soit passé quelque chose quand on les rouvre. »

Mais les temps, eux, étaient meilleurs. « Dans les années soixante-dix, quand Chirac était ministre de l'Agriculture, on savait pourquoi on investissait, reprend Michel. On avançait, et là, ça avance plus. » Jean : « On achetait une vache 2.200 francs, on vendait le broutard 3.000. On pouvait investir sans soucis. Ça nous a permis d'acheter nos terres, ici, à Allanche, dans l'Orne. S'il fallait faire ça aujourd'hui… je m'em… pas, je ferais du lait en vrac. » « Moi je foutrais le camp et je serais céréalier, rigole son frère. Ça, ça gagne ! »

Au fond, la seule chose qui n'a pas changé, c'est la salers. Son lait, et le fromage qui en découle. Pourquoi ? « Parce qu'on fait ce qu'on sait faire, point barre, tranche Charlotte. » « Le père disait : "quand tu sauras plus traire une vache, ça n'ira vraiment pas" se souvient Jean. Parce que quand t'en ch… pour traire, tu fais gaffe à faire du bon fromage. Il est arrivé avec des Aubrac, et il est vite passé aux Salers. Et nous, on n'a jamais fait que ça. Et on les a défendues… jusqu'à Bruxelles dans les années 2000. On s'est battu à la cour Européenne pour que le Salers ne soit fait qu'avec du lait de salers. Mais on a perdu. »

Sans cesser de se battre. « On avait la foi d'être des loups ». Et l'exploitation est toujours là, tenue par une de leurs quatre filles. Qui a repris l'affaire, l'a développée avec, toujours, les aïeux au soutien. Pour un bout de temps, encore, si on croit Michel. « La retraite ? Mais pour faire quoi ? »

Le fromage : un accident. Michel : « Maintenant, on peut le dire, on s'en f… Si on s'est mis à faire du fromage, c'est parce qu'on s'est engueulé avec la laiterie. »

Yann Bayssat

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article